Une formation qui cible les jeunes en reconversion professionnelle
L’objectif pour le pôle de formation de Briacé, qui a travaillé en partenariat avec Pôle emploi, la Mission locale et la Région des Pays de la Loire, est avant tout de cibler des jeunes dans une filière où la plupart des salarié·e·s sont proches d’un départ à la retraite : « Ce qu’on a ciblé avec Pôle emploi, la Mission locale et la Région c’est un profil de personnes qui sont en reconversion professionnelle, […] des jeunes qui sortent de l’école et qui veulent ouvrir une nouvelle voie. », explique Mickaël Arnoux. « La formation s’oriente aussi vers des demandeur·se·s d’emploi qui cherchent à rebondir et se former pour pouvoir intégrer la viticulture ou l’œnologie. » précise-t-il. Mais la formation qui délivre le niveau CAP, voit également passer des profils parfois surprenants comme nous l’explique le formateur :
« Les gens qui viennent ont des profils atypiques […] on a eu des ingénieur·e·s nucléaires qui viennent faire un CAP ».
Un métier qui requiert une certaine sensibilité à la nature et à la terre
Entre les activités d’entretien et de taille de la vigne auxquelles s’ajoutent l’initiation à la conduite du tracteur enjambeur et l’utilisation d’outils mécaniques ; le métier de viticulteur·rice nécessite de nombreux savoirs et savoir-faire ainsi qu’une affinité particulière à la terre et au grand air : « Pour être viticulteur·rice, il faut aimer être dehors, c’est un métier d’extérieur […] il faut également avoir une sensibilité au végétal assez importante, car on travaille essentiellement avec du végétal. Il faut aimer la terre, le terroir, car il y a un lien très fort entre la roche qu’on va trouver dans le fond du sol et puis l’expression que l’on retrouvera au final dans les vins, donc il y aussi cette sensibilité-là. ».
Mickaël Arnouxindique toutefois que la profession requiert aussi certaines aptitudes en mécanique : « On utilise énormément d’engins et à l’époque c’était des métiers qui étaient réputés pénibles parce qu’il y avait beaucoup de travaux manuels, mais depuis une vingtaine d’années, ces métiers se sont extrêmement mécanisés, on a beaucoup d’outils, de robots qui viennent nous aider. ».
La filière viticole un secteur où la question du renouvellement des générations se pose...
« On a participé à une étude, il y a deux ans maintenant, où ils·elles ont recensé les besoins de formation sur les différentes régions […] et il est clair qu’on a un déficit sur la tranche d’âge dix-huit / vingt ans » constate Mickaël Arnoux, rajoutant au passage que : « Sur le Bac Pro on a du mal à recruter dans tous les lycées viticoles […] même dans les grandes régions historiques : Bourgogne, Bordelais, Champagne également... ». Ce manque de jeunes dans les formations viticoles peut s’expliquer selon le formateur par un « désintérêt des jeunes pour le métier » et aussi « une méconnaissance du métier ».
Toutefois, les formations BTS ont, elles, beaucoup moins de mal à recruter, Mickaël Arnoux évoque un effectif de « 26 élèves […] en BTS » à Briacé. Ce qui peut justifier de meilleurs chiffres au sein du BTS selon lui, c’est l’accès à la formation via la plateforme Parcoursup. « Il y a aussi en BTS Viticulture et Œnologie la mention « œnologie » […] qui n’est pas faîte sur le Bac Pro et qui attire. On pense que c’est la notion d’œnologie qui fait que les gens viennent plus sur le BTS ».
Lorsqu’on lui demande quelles sont les explications à ce manque de main d’œuvre dans la profession, le formateur met en cause deux éléments : « Il y a déjà un effet structurel, on est dans la phase « Papi Boom » on a beaucoup de gens qui sont en train de partir en retraite depuis 4 – 5 ans et les salarié.e.s actuel.le.s et les responsables d’exploitations ne sont pas remplacé·e·s. ».
Le deuxième phénomène qui vient s’ajouter à cela, c’est "le désintérêt". Le formateur s'interrogeant en ces termes : "peut-être qu’on a une image de ces métiers où les gens ont peur de travailler à l’extérieur, ils·elles ont encore l’image de la taille traditionnelle avec un sécateur manuel où il faut forcer toute la journée, où l'on peut avoir des tendinites...Ils·elles n’ont pas forcément conscience qu’aujourd’hui, on a du matériel qui nous aide, nous accompagne et nous soulage. » argumente Mickaël Arnoux.
Ces problématiques de main d’œuvre touchent plus largement la plupart des métiers agricoles, selon lui :
« On est sur des formations agricoles, et les formations agricoles n’attirent pas, on le voit bien dans les autres secteurs agricoles, ils ont du mal aussi à recruter. ».
Des métiers qui demeurent avant tout des passions
Malgré tout, ces métiers restent « des métiers passions, on a énormément de compétences dans nos métiers et des spécialisations très différentes » et parmi les personnes qui viennent suivre les formations, Mickaël Arnoux ajoute :
"On a un certain nombre d’adultes qui reviennent via ces passions qu’ils·elles ont pu avoir pour la nature, pour le vin ou pour le fruit quand ils·elles étaient jeunes."
La profession d’ouvrier viticole appelle à plusieurs disciplines telles que la biologie, la physique, la chimie, l’agronomie, la météorologie, et cela représente des petits challenges quotidiens, car de nombreux phénomènes se produisent dans les cultures et cela demande au viticulteur et à l’œnologue de savoir comment les anticiper. Le contact avec la nature et le goût pour le travail de production sont deux éléments fondamentaux chez l’ouvrier·ère viticole : « Dans nos métiers, il y a à la fois le contact de la nature et la production. C’est vrai qu’à la fin de la journée, on a un peu la satisfaction du devoir accompli » nous dit-il.
*Chai : Bâtiment où se déroule tout le processus de vinification.
Une interview réalisée par Antoine Camara
Un article rédigé par Antoine Camara
Photo de Une : Des viticulteur·ice·s travaillant dans les vignes. Crédit : pôle de formation de Briacé